Définir le Terrorisme: Défis et Pratiques

Définir le Terrorisme: Défis et Pratiques
Depuis les attentats du 11 septembre 2001, le terrorisme est devenu un phénomène d’am-pleur mondial. Il a bouleversé l’architecture sécuritaire des États en commençant par les États-Unis après la chute des deux tours du World Trade Center. En France, les attentats de janvier 2015 au comité de rédaction du magazine satirique Charlie Hebdo et les attaques meurtrières revendiquées par la même organisation terroriste – l’État islamique – lors de la soirée du 13 novembre 2015 à Paris ont annoncé un renouveau du terrorisme sur le conti-nent européen. Aujourd’hui, de fait, le terrorisme n’épargne aucun continent et est deve-nu omniprésent dans l’actualité mondiale. À l’instar des pays ciblés par des attentats dits « terroristes », la communauté internationale est alarmée par l’augmentation des conflits non conventionnels utilisant la violence politique pour renverser la position dominante des détenteurs de la violence légitime. Aussi, le terrorisme a émergé comme une mauvaise herbe sur l’ensemble du globe et l’engrais procuré par les conflits au Levant, la déstabilisation au Sahel, la fragilisation des États de l’Afrique du Nord après le printemps arabe et l’intervention-nisme unilatéral a eu comme conséquence d’alimenter et de propager ce fléau. Pourtant, la cessation des activités par les tigres tamouls au Sri Lanka (1976-2009), la disparition quasi-to-tale du terrorisme nationaliste en Europe et l’affaiblissement d’Al Qaida après la mort de son leader, Oussama Ben Laden, en 2011 auraient pu conduire à un essoufflement de la violence politique. Nonobstant, le terrorisme est doté de racines profondes envahissant aisément un terrain propice à son développement, comme nous avons pu l’observer notamment par la naissance de l’organisation de l’État islamique dans la République d’Irak, fragilisée par les conflits, et dans la République arabe syrienne déchirée par la guerre civile. Malgré l’omni-présence de conflits asymétriques ciblant les innocents, le terrorisme demeure un concept indéfini évoquant des réticences et les contestations de toutes parts.
La question du terrorisme a récemment été abordée de nouveau aux Nations Unies (ONU) dans le cadre du plan d’action pour la prévention de l’extrémisme violent (PVE)1 présenté le 15 janvier 2016 par le Secrétaire général et lors de la conférence de Genève sur la prévention de l’extrémisme violent co-organisée par les Nations Unies et la Suisse, les 7 et 8 avril 2016. Bien que le sujet continue à être présent dans les arènes internationales, la signification du « terrorisme » en soi n’est plus, pour autant, complétement au cœur des réflexions2. Néan-moins, il est primordial que la problématique définitionnelle redevienne un enjeu central au sein de la communauté internationale : d’une part, l’absence d’une définition universelle porte préjudice à la stratégie mondiale de la lutte contre le terrorisme, d’autre part, le vide juridique crée par la non-existence d’une définition universellement acceptée permet de mettre en œuvre en tout impunité des politiques gouvernementales de contreterrorisme violent les droits fondamentaux des individus – les droits de l’homme et le droit internatio-nal humanitaire. Ainsi, l’enjeu de la définition du terrorisme dépasse le débat scientifique. Le présent texte argue que la définition est l’un des éléments fondamentaux permettant de réduire le terrorisme et qu’elle représente donc un défi majeur de notre époque. Pour repenser la problématique définitionnelle sous le prisme d’une analyse conceptuelle et his-torique, nous procéderons de la manière suivante.
Dans un premier temps, une réflexion critique présentera les conséquences des désaccords sur le concept du terrorisme et l’urgence d’établir un consensus sur ce terme controversé. Autrement dit, nous nous préoccuperons de la nécessité d’obtenir un consensus sur la défi-nition du terrorisme au sein du droit international régissant la communauté internationale. De surcroît, la problématique de l’absence d’une définition universelle du terrorisme est abordée à travers une réflexion critique, expliquant les pierres d’achoppement et obstacles relatifs à la problématique conflictuelle de la signification du terrorisme. Subséquemment, les difficultés inhérentes, historiques et politiques, seront analysées afin de saisir la complexi-té de ce terme établissant un véritable casse-tête au sein de la communauté internationale.
Dans un deuxième temps, il s’agira de présenter synthétiquement les tentatives infructueuses relatives à la définition du terrorisme de la communauté internationale et scientifique tout en explicitant brièvement les instruments juridiques actuels. De surcroît, des idées seront soumises, dans cette partie, afin d’établir des pistes pouvant désamorcer un problème que l’on peut considérer comme éminemment politique.
Adrien Burkhalter est Junior Programme Officer au Geneva Centre for Security Policy (GCSP) où il travaille sur l’interaction entre la sécurité et la politique internationale dans les domaines du terrorisme et de la politique étrangère. Précédemment, il a été stagiaire au Département Fédéral de la Défense, de la Protection de la Population et des Sports (DDPS) suisse, où il a contribué aux analyses de renseignement liées au terrorisme ; et il a également occupé une position de collaborateur au Centre Dürrenmatt de Neuchâtel (CDN).